Les enseignements qui font de l'Église Adventiste du 7e Jour un corps constitué doivent finalement conduire le monde à choisir entre la vérité et l'erreur. Aussi prétentieux que cela puisse paraître, il en est ainsi sinon l'existence de cette Église ne se justifie pas. Quantité d'organismes religieux ou de bienfaisance, dotés d'un nombre de membres et de moyens matériels que nous ne possédons pas pourraient se charger des tâches que les Adventistes s'efforcent d'accomplir - à moins que, réellement, il y ait dans ce que nous professons quelque chose qui rende notre rôle irremplaçable. Que nous soyons dirigeants ou simples membres, notre incapacité à comprendre pleinement cette vocation divine témoigne de notre insécurité et de notre souci de nous faire accepter par le monde. Notre foi reste immature. Nous n'avons pas encore une conviction inébranlable que la vérité du message qui nous a été confié devra un jour régner en maître pour vaincre le péché et ses adjuvants.


Nous sommes convaincus de ne pas devoir croire au salut par les oeuvres, bien que, trop souvent, nous le pratiquions, et parfois le publiions. Notre échec devant l'achèvement de l'oeuvre provient d'une stratégie de comité toute humaine remplaçant la conviction profonde de l'unique vérité que nous soutenons. Il nous répugne d'admettre que l'Évangile est véritablement « la puissance de Dieu pour le salut », seul salut protégeant des pièges de l'ennemi de Dieu, et non seulement de bons conseils pour alimenter nos émotions. Nous nous contentons de la théologie courante et paraissons aveugles à l'erreur fondamentale inhérente à presque tous les enseignements des Évangéliques modernes. Nous ne sommes pas certains que Jean le Révélateur ait dit vrai quand il a dit : « Babylone ... est tombée. Elle est devenue une habitation de démons, un repaire de tout esprit impur, un repaire de tout oiseau impur et odieux... Toutes les nations ont bu du vin de la fureur de son impudicité. » (Apoc. 18:2-3). Ce cri d'avertissement du ciel de n'avoir aucune part aux péchés de Babylone n'autorise aucun compromis et contient un impératif que nous ne pouvons esquiver.


Notre embarras est désormais connu du public, et les Évangéliques concentrent leurs attaques sur nos propres incohérences - des erreurs doctrinales qui nous rendent vulnérables. Ils signalent le moment et le lieu où nous avons commencé à nous écarter de « l'Adventisme du milieu du XIXe siècle ». Ils proclament, devant nous et devant le monde, que le changement a commencé dans les années 1950 et que nous avons été une « secte non chrétienne ». Dans les années 1960, le dialogue avec eux nous a bel et bien entraînés dans leur camp, bien que quelques intellectuels adventistes se soient fermement opposés à ce que l'on s'écarte de ce qui a été récemment dénommé « Adventiste traditionnel ». Toujours est-il que, vers le milieu des années 1970, il y avait deux groupes distincts dans l'Adventisme - le « traditionnel » et « l'évangélique ». Puis, dans les années 1980, les Adventistes connurent une nouvelle crise théologique.


Les racines de cette crise se trouvent dans le livre « Questions on Doctrine », publié en 1957. Ce livre reniait Certains enseignements historiques importants de l'Adventisme, que l'on qualifie maintenant de « traditionnels ». En conséquence de cette situation, il se forma dans l'Église un autre groupe connu sous le nom d'« évangélique ». Ce dernier adoptait les points principaux suivants :


1) la notion Réformée de la justification par la foi est un acte judiciaire de Dieu qui ne comporte que la justification;


2) Christ possédait une nature humaine sans péché comme celle d'Adam avant la chute;


3) les événements de 1844 et la doctrine du sanctuaire n'ont aucune base dans l'Écriture;


4) l'assurance de notre salut repose uniquement sur l'imputation de la justice de Christ et l'observation des commandements est impossible;


5) Ellen G. White était une chrétienne authentique; toutefois ses écrits ne sont par irrécusables et l'on ne doit pas s'en servir comme d'une autorité doctrinale.


Il reste à voir comment les Évangéliques vont finalement nous juger. Finirons-nous par être, selon leur définition, « traditionnels » et « égarés », « théologiquement en faillite » avec un « évangile dénaturé », « condamnés à la tâche sans fin d'essayer de se montrer à la hauteur de la sainte loi de Dieu »; ou, comme ils l'espèrent, adhérerons-nous à l'« Adventisme évangélique », et serons-nous acceptés en ôtant l'étiquette de « secte »?


Nous devons regarder notre situation en face, dans toute sa vérité. Mais, ce qui est plus important, ce sera d'avoir le courage, et la force morale de nous confronter à la vérité nue et à la pure justice? Avons-nous conscience de notre vocation comme corps constitué? Comprenons-nous qu'il y a un conflit cosmique qui doit être résolu, et que la solution ne consiste pas à recruter un plus grand nombre de gens qui s'intéressent aux demeures célestes, mais un peuple résolu à combattre pour le bien, même si l'univers s'écroulait? Christ est devenu notre substitut et notre garant afin de nous rendre capables d'être des vainqueurs, quelle que soit l'opinion du monde.


La tension théologique dans l'Église Adventiste approche du point de rupture. Actuellement l'unité chancelle, et sans unité, l'Esprit Saint ne peut d'aucune manière se manifester et accomplir l'oeuvre que le ciel a entrepris il y a cent ans. Adventismes « Traditionnel » et " Évangélique » forment un contraste marqué, et c'est un mystère qu'ils coexistent de nos jours dans notre Église.


Le large spectre de nos interprétations doctrinales engendre anémie et instabilité. Le fait que nous donnions aujourd'hui un double sens à certains enseignements fondamentaux donne à penser aux Évangéliques que nous sommes dans leur bergerie, théologiquement au clair, enfin décrassés et affinés, prêts à être distingués des « sectes ». Même les « 27 Doctrines Fondamentales » peuvent, en certains cas, être interprétées dans un sens convenable et autoriser un double sens.


C'est pourquoi les Adventistes prêtent aujourd'hui deux sens différents aux notions fondamentales telles que : la justice par la foi, la nature humaine de Christ, l'assurance du salut, l'autorité d'Ellen White, l'observance du Sabbat, et le ministère de Christ dans le sanctuaire. D'autres doctrines adventistes caractéristiques telles que l'immortalité conditionnelle, la destruction des méchants, la réforme sanitaire et la notion de l'église du reste, bien qu'elles s'écartent du courant évangélique principal et soient considérées comme sans rapport biblique, n'empêchent pas que l'on nous regarde comme disciples de Jésus. Ainsi, c'est notre défaillance par rapport à la vérité qui nous a rendus acceptables. Nous allons devoir décider si Babylone est vraiment « une habitation de démons, un repaire de tout esprit impur ». L'ange se trompait-il en criant au peuple de Dieu de « sortir du milieu d'elle... afin qu'il ne participe point à ses péchés. » (Apoc. l8:24)?


Le temps est venu pour les Adventistes du 7e Jour de savoir que ni l'Adventisme « Évangélique » ni le « Traditionnel » ne seront suffisants face à la crise finale. Aucun des deux n'est capable de gagner la guerre que le dragon mène contre « le reste ».


Sommes-nous la postérité d'Abraham?


La grande vérité qui a donné naissance à l'Église Adventiste du 7e Jour, qui justifie son mandat divin et alimente sa destinée est la vérité que les Évangéliques ridiculisent le plus. Et ils ne sont pas les seuls! Au sein de certains cercles adventistes un subtil courant souterrain d'infirmation et de destruction de l'enseignement sur le sanctuaire et le jugement, continue sans perdre de sa vigueur. On n'a pas suffisamment aperçu la conséquence de cette bataille souterraine.


Les Évangéliques se plaisent à qualifier l'enseignement du sanctuaire d'« expédient pour sauver la face » alors que c'est une confirmation de notre foi. C'est la plus caractéristique de toutes les convictions adventistes. Avec le Sabbat, elle donne force et signification à tout le plan du salut plus qu'aucune autre vérité ne le fait. Elle a une histoire que nous ne pouvons nous permettre d'ignorer.


La nation d'Israël fut conçue dans le culte du temple. Depuis le modèle embryonnaire élevé par Abel jusqu'à l'expérience déchirante d'Abraham au Mont Moriah, la voix de Dieu parle clairement. Les instructions directes que Moïse reçut pour bâtir un sanctuaire « d'après le modèle montré sur la montagne » (Hébr. 8:5) décrivent un plan divin qui sollicite la pleine compréhension du peuple de Dieu. L'identification de la nation d'Israël avec une religion inspirée par le ciel prit forme au pied du Sinaï. Aussi longtemps qu'ils eurent le sanctuaire et le temple, les Juifs eurent confiance en leur destin. Aussi, lorsque Jérusalem fut assiégée, la dernière place forte à se rendre fut-elle le temple.


C'est ce prétendu respect pour le temple qui amena la condamnation à mort de Jésus. Il avait supporté bien des accusations mensongères, mais à la fin « quelques-uns se levèrent, et portèrent un faux témoignage contre Lui, disant : Nous l'avons entendu dire : « Je détruirai ce temple fait de main d'homme, et en trois jours j'en bâtirai un autre qui ne sera pas fait de main d'homme. » (Marc 14:57-58)


Leur rejet de Christ reflétait leur propre mépris pour le temple qu'ils prétendaient vénérer. Chaque élément du mobilier, chaque acte rituel était un symbole révélant le Messie qu'ils reniaient. Il était l'Agneau, le Sacrificateur, la Shekinah. Leur rejet aveugle de Sa personnalité était en réalité une prophétie annonçant la destruction du temple Mais en trois jours Sa résurrection reconstruirait un temple de vérité dont le temple de pierre n'avait été qu'un type. Le temple fait de main d'homme allait céder la place au temple fait par l'Esprit. Le Souverain Sacrificateur deviendrait en vérité « ministre du sanctuaire et du véritable tabernacle, qui a été dressé par le Seigneur et non par un homme. » (Hébr. 8:2)


Le témoignage redoutable donné par le « Témoin fidèle « à cette Église est que nous aussi nous sommes atteints par cet aveuglement. Les Adventistes représentent le seul corps constitué ayant existé depuis Israël et étant, comme lui, né et élevé dans la symbolique du sanctuaire. La compréhension du modèle céleste montré à Moïse a résolu la crise prophétique de 1844. Ce ne fut pas simplement la « vision » d'un homme dans un champ de blé mais la conscience que le problème ultime de l'univers est celui du péché et ne peut être résolu que par la méthode de Dieu. Cette compréhension donna naissance à l'Adventisme.


Cette institution céleste qui a nettement démarqué notre identité engendre le mépris dans le monde évangélique. De plus en plus elle est mise en question dans notre milieu, en tant qu'héritiers spirituels d'Abraham, car beaucoup d'Adventistes verraient avec plaisir leur identité disparaître et leur caractère unique se fondre dans la masse. Au bout de quatre ou cinq générations, la proclamation de l'Apocalypse est défraîchie. Nous ne sommes pas certains d'avoir de bonnes raisons d'entrer en conflit spirituel avec le reste du monde. Notre destinée prophétique s'obscurcit. Nous sommes prêts à nous joindre à l'ancien Israël dans sa frustration prophétique et à pousser le même cri : « les jours s'éternisent, toute vision s'obscurcit ». Notre problème n'est pas tant que nous soyons « aveugles », mais plutôt que nous croyons « voir ». Jésus leur répondit : Si vous étiez aveugles, vous n'auriez pas de péché. Mais maintenant vous dites : « Nous voyons. C'est pour cela que votre péché subsiste. » (Jean 9:41).


Tous les signes indiquent que nous sommes bien la postérité d'Abraham.


Que devraient faire les enfants d'Abraham?


Les Adventistes du 7e Jour se sont contentés d'assister passivement au déroulement de l'histoire. Nous avons su déchiffrer tous les « signes » avec beaucoup de pénétration mais ceux-ci deviennent de plus en plus embarrassants - et le temps s'écoule. Les « signes » vus par les pionniers ne s'accordent pas avec l'âge atomique. Aussi bien les machines à vapeur que les réacteurs nucléaires produisent de l'énergie, et constituent de merveilleuses inventions, mais ni les unes ni les autres ne sont un « signe » de la fin. Beaucoup d'Adventistes sont très préoccupés de faire entrer les événements de la fin au bon endroit dans le calendrier prophétique. On fait des schémas et des compilations détaillées pour montrer quand s'achèvera l'épreuve, aura lieu l'imposition des sceaux, viendra la pluie de l'arrière-saison, passera la loi du dimanche et quand sera accomplie le criblage qui précède le temps de détresse et d'autres détails. Ces choses sont sans doute importantes, mais elles ne décident pas de l'issue de « la guerre du dragon contre les restes de sa postérité ".


Chaque année qui passe devrait rendre plus évident le fait que les événements de la fin sont de moindre importance que les enjeux de la fin. Il est plus que temps pour l'Église de comprendre que les derniers événements dépendent du fait que les enjeux soient clairement mis en lumière. Tant qu'ils ne le seront pas, l'Église restera prisonnière de son propre aveuglement. Cela signifie que les anges doivent continuer à retenir les vents des événements jusqu'à ce que l'église affronte les enjeux réels. La persécution arrivera en conséquence des enjeux de la bataille et des victoires spirituelles remportées.


Trop longtemps l'Israël moderne a considéré que la tenue des livres célestes était chose lointaine et sans grand rapport avec la vie quotidienne sur terre. Un trop grand nombre se contente de laisser le ciel s'occuper du jugement qui est maintenant en cours, et de penser que lorsque les anges arriveront au bout de la liste de noms, la fin viendra. Mais cette attitude égoïste est la négation de notre responsabilité collective ici et maintenant. Si nous devons un jour apparaître comme une force apocalyptique, il nous faut comprendre 1844 beaucoup mieux que l'ancien Israël n'a compris le service du temple lors du premier avènement. C'est en cette heure du jugement que Dieu appelle un peuple à tenir ferme avec Lui afin de clore pour l'éternité le conflit entre la vérité et l'erreur. Les enjeux sont le facteur déterminant. Les événements sont la conséquence des enjeux.


En cette heure, les enfants d'Abraham doivent faire un retour sur leur histoire et réexaminer leur mandat divin afin de connaître la valeur de leur héritage et leur responsabilité d'après les oracles confiés par Dieu.